Une petite ville tranquille en banlieue avec une belle maison, un mari, deux enfants et un chien. C’était la vie que souhaitait mes parents pour moi et ce n’est malheureusement pas celle que j’ai choisie. Je suis née à Dallas au Texas. Je suis la fille unique d’une mère californienne et d’un père texan. Le genre de mélange qui donne une jolie demoiselle à la chevelure blonde et aux yeux bleus aciers. Toute petite, je rêvais d’aventures et d’histoires remplies de drames. J’ai finalement obtenu le gros lot en étant adulte.

J’étais une fillette rêveuse et calme. Le genre de petite fille qu’on est fier de présenter à tout le monde en montrant à quel point elle est bien élevée. Je tiens à dire que cela n’a pas duré très longtemps. Mes parents ont décidé de déménager à San Diego alors que j’avais 15 ans. Mon père avait trouvé un nouveau boulot pour les affaires et ma mère restait à la maison comme elle l’avait toujours fait durant toute sa pathétique vie. J’ai découvert les plages, les bikinis et … les mauvaises fréquentations. Mon plus grand passe temps était de passer du temps à la plage à parfaire mon bronzage et regarder les charmants jeunes hommes marcher sur cette dernière. Je séchais souvent les cours ne voyant aucunement l’intérêt dans ses derniers. Je n’étais pas très douée à l’école malheureusement. J’ai donc commencé à sortir en douce le soir alors que j’avais 16 ans. Je buvais de l’alcool en cachette et je fumais un peu de marijuana pour le plaisir plus que par nécessité. J’étais bien loin d’être accro à tout ça. Ma meilleure amie, Sarah, était complètement addict à ce mode de vie. Ma mère ne cessait de me dire qu’elle était une mauvaise influence pour moi car elle se tenait avec des gangs. Je n’écoutais pas trop car je m’en fichais totalement en fait.

J’ai tout de même réussi à obtenir mon diplôme. Aucun mention, rien. Je préférais travailler dans un petit bar avec Sarah en prétextant à mes parents que je ne savais pas quoi faire de ma vie à cet instant. C’était plutôt vrai en fait. J’ignorais ce que je voulais faire contrairement à beaucoup d’autres jeunes de mon âge. Je ne voulais pas être avocate , médecin ou encore dirigeante d’une entreprise. Je voulais simplement m’amuser et profiter de ma jeunesse. On peut toujours retourner à l’école non? Mes parents ont décidé pour leur part de retourner à Dallas. Je ne les suivais pas, préférant me prendre un petit appartement avec ma meilleure amie. J’évoluais sans trop le vouloir dans le monde des gangs et je voyais la drogue passer. Je m’en fichais un peu cependant. Cela n’avait aucune importance.

J’avais 22 ans lorsque je rencontrais Emilio Jiménez. Je tombais très rapidement amoureuse de ce bel homme grand et fort. Son côté «bad boy» m’attirait comme jamais et j’étais heureuse dans ces bras. J’avais beau travailler dans ce bar le soir, je savais que j’étais en sécurité avec lui et notre relation évoluait rapidement. Je le soutenais dans ses «affaires» et il m’aidait dans à peu près tout. Qu’est-ce que je pouvais vouloir de plus en fait? Mon bonheur était complet. Un soir, j’étais incapable de rentrer travailler au bar. J’avais passé la journée à vomir tout ce que je mangeais et je pensais avoir attrapé une saleté de tourista de merde en croisant un touriste. Emilio était inquiet, j’étais rarement malade. Il a été dans l’obligation de m’amener aux urgences le lendemain car j’étais totalement déshydratée. Surprise à ce moment, après un bilan sanguin j’apprenais que j’étais enceinte. J’étais surprise mais en même temps nous n’utilisions pas de contraceptions de manière assidue Emilio et moi. Il était heureux que je porte son bébé et nous étions repartie ensemble pour regagner notre petit nid d’amour.

Il me demandait en mariage rapidement et j’étais aux anges. J’avais mon bonheur à moi en cet instant. Je me rappelle encore ce moment où j’avais appelé mes parents pour leur dire que ils avaient raccroché la ligne directement. Je me disais que j’avais une nouvelle famille et ce serait tant pis pour eux. J’étais tellement amoureuse de lui et je le suis encore aujourd’hui. Malheureusement, il se faisait incarcéré pour homicide. Mon monde s’effondrait. Est-ce que ce serait ma vie? Une vie sans mon mari car il serait toujours en prison? Une vie à craindre pour celle de mon enfant et la mienne? J’ai alors pris peur. Une peur viscérale qui vous fait faire des bêtises. Je suis partie sans laisser un mot en pleurant toutes les larmes de mon corps. Je me suis rendue chez mes parents pour heurter à une porte fermée. Pour eux, j’avais fait les mauvais choix et je payais pour mes actes.

Je me suis trouvé un appartement à Chula Vista. Rien d’exceptionnel. Un petit appartement sans contrat de location qui sentait le moisi et qui n’avait que deux pièces. Je continuais de bosser autant que je le pouvais. Je n’avais pas de voiture et pas les moyens d’avoir un téléphone portable. Il était 14h00 lorsque j’ai ressenti les premières contractions dans mon appartement. J’étais morte de peur à l’idée de donner naissance à ce bébé dont j’ignorais le sexe. Je prenais les transports en communs pour me rendre à l’hôpital. Je n’avais pas d’assurance pou couvrir une ambulance et encore moins les moyens de prendre un taxi. Je restais calme durant tout le transport avec mon petit sac de sport. Je me rendais finalement à la maternité à 20h00. Déjà plus de 6h00 que je souffrais en silence. On m’installait dans une chambre pour l’accouchement, mais je refusais les anti-douleurs. Trop cher dans l’immédiat. J’ai crié le prénom d’Emilio sans fin sans jamais le voir arrivé. Je donnais finalement naissance à un petit garçon à 06h14 du matin. Je le nommais Liam Jiménez. Il porterait le nom de son père. Je devais au moins cela à Emilio.

Je rentrais dans notre petit appartement 48 heures plus tard. Je ne savais pas vraiment ce que je faisais. J’essayais de répondre aux besoins de mon fils avec les yeux cernés et le manque de sommeil. Souvent, je pleurais avec mon nouveau-né en me disant que j’avais peut-être fait une erreur en partant sans dire un mot. Le temps avançait malgré tout et je voyais bien la violence qui régnait à San Diego. Au fond, j’avais fait le bon choix de l’éloigner de toute cette violence.

Sarah avait gardé un contact restreint avec moi puis un jour plus rien. Liam avait alors trois ans. Je ne savais pas ce qu’elle était devenue jusqu’au jour où je passais un peu de temps sur internet et je voyais sa photographie dans la section des gens décédés. De quoi mon amie était-elle morte ? Je ne le saurais jamais. Ce fut un deuil relativement difficile à surmonter mais je passais au travers avec mon fils. Il allait dans une petite garderie durant mes longues heures de travail et j’avais souvent parfois l’impression de le négliger. Je faisais de mon mieux avec les moyens que j’avais. Il grandissait si vite que bientôt il commença l’école élémentaire. Il était un élève brillant et surtout un sacré farceur. Il avait cependant le défaut d’être bagarreur. Il aimait protéger ses amis et je reconnaissais bien là un trait de caractère de son père.

J’allais plus souvent qu’à mon tour régler les soucis à l’école. Un jour, alors qu’il avait neuf ans, mon téléphone portable sonnait au petit diner. Je décrochais en levant les yeux au ciel. Encore l’école qui appelait sans doute pour une bagarre. La douche froide fut terrible. Mon fils avait eu des convulsions en plein cours et il était en route pour l’hôpital local. Je lâchais tout ce que je faisais et je me rendais aux urgences en cherchant mon fils. Il avait de l’oxygène dans la salle de traumatologie et je voyais une perfusion dans son petit bras. C’est vrai qu’il m’avait dit être fatigué mais je ne pensais pas qu’il était malade. Je regardais mon téléphone à de nombreuses reprises en hésitant à appeler Emilio… Que dirait-il si je l’appelais maintenant ? Je ne saurais même pas quoi lui dire en dehors de fondre en larmes. Il pourrait aussi me dire de me débrouiller. Je l’avais si bien fait jusqu’à maintenant.

J’attendais durant de longues heures les résultats des milliers de prise de sang. Le verdict tombait rapidement cependant : diabète de type un. Mon fils ne générait pas d’insuline. Il fut monté sur le minuscule étage de pédiatrie et soigner au mieux. J’allais devoir lui faire des injections trois fois par jour ou plus selon son taux de sucre. Après plusieurs jours d’hospitalisation et de travail manqué nous sommes rentré à la maison. Je payais les médicaments avec ma carte de crédit et je prenais une entente de paiement avec l’hôpital pour payer tranquillement l’hospitalisation de mon fils. Pour l’instant ça allait. Je revoyais mon budget en conséquence et je payais en temps et en heure.

Malheureusement, Liam fut de nouveau hospitaliser à cause de son diabète incontrôlable. Je faisais de mon mieux pour le soigner mais c’était de plus en plus difficile. À Chula Vista, les pédiatres n’avaient pas assez d’expérience pour des cas aussi difficile que mon fils. Ils voulaient transférer son dossier au Rady Children’s Hospital. Ça devenait de plus en plus compliqué et son état était instable. Mes factures s’empilaient et une nuit, le médecin de garde décidait de le transférer aux soins intensifs de cet hôpital. Mon fils fut intubé et mit dans un coma artificiel pour éviter qu’il ait des dommages à son cerveau. Le transport fut organiser en hélicoptère. Pour ma part, je bouclais mes valises avec une immense rapidité et je mettais toutes nos choses dans la voiture. Je roulais jusqu’à San Diego avec la boule au ventre. J’avais des retards de paiement avec les hôpitaux et le transfert à lui seul allait me coûter la peau des fesses. J’étais dans une impasse. Je me rendais à l’hôpital pour enfant auprès de mon petit garçon et je le regardais dans son piteux état. Je caressais ses cheveux. Il était tellement comme son père. Je posais un baiser sur son front en ravalant ma fierté alors qu’une nouvelle enveloppe était posée sur la table de chevet. Une facture de plus… Je prenais mon téléphone et je composais le numéro de la Tequileria. Je savais que les Chicanos étaient souvent à cet endroit. Je serais bien allé en personne, mais je ne pouvais pas quitter le chevet de mon fils dans l’immédiat.

- J’aimerais parler à Emilio Jiménez s’il vous plait … Dites que c’est Spencer McKay c’est important.

J’attendais en me passant une main dans les cheveux et en tapant du pied nerveusement. Je rongeais mon ongle. Une minute … Deux minutes … Cinq minutes … Sa voix. Cette voix que je pourrais reconnaître de loin et parmi des milliers. Le cœur allait me sortir de ma poitrine et je m’approchais de Liam en passant une main dans ses cheveux avec douceur.

- Emilio … Je … Je suis au Rady Children’s Hospital avec notre fils. Il est aux soins intensifs et il a besoin de son père…

C’était dit. Il avait un fils et il était malade. J’ignorais ce qui m’attendait désormais, mais je savais une chose. Je ferai tout en mon pouvoir pour que mon fils ne manque de rien et qu’il reçoive les soins qu’il mérite.